• Cela fait une semaine que les attentats se sont déroulés à Paris, une semaine suspendue comme un mauvais rêve. Comment tout citoyen, j’ai été frappé par la violence, la brutalité et le sang froid de ces assassins. Tout comme pour les tueries de Charly Hebdo, le peuple français a fait preuve d’un patriotisme presque oublié. La population s’est réapproprié le drapeau français qui, jusqu’à présent, avait été accaparé par les partis d’extrême droite (de la même manière que l’UMP a accaparé le terme « Républicain »). Le drapeau permet ainsi à notre nation de se retrouver pour exprimer sa douleur et ses valeurs communes. Nos couleurs françaises ont fleuri les réseaux sociaux. Facebook ayant même créé une application pour repeindre automatiquement nos photos aux couleurs françaises. La Marseillaise a été magnifiée, en cœur, par nos pays amis ; certains accents la rendant incompréhensible, mais profondément touchante. Mais je continue de me questionner quant à ce paradoxe qui réside dans le fait de chanter la paix avec des paroles qui réclament qu’ « un sang impur (des jihadistes) abreuve nos sillons ».

    Sans projet de société, le radicalisme a toutes ses chances

    Pour ma part, je n’ai pas mis le drapeau sur mon Facebook. Pas parce que je ne le revendique pas. Je suis français et j’aime mon pays. J’aime ses valeurs et la place qu’il occupe dans le monde. Mais j’avoue que je n’ai pas partagé la peine nationale. Nous avons perdu, sans compter les blessés, les traumatisés, 130 vies. C’est énorme, c’est monstrueux. Mais qu’est-ce en comparer des autres massacres de Daech, d’Al Qaïda, de Boko Haram, ou simplement de Bachar Al Assad dans son propre pays ? Des dizaines, des centaines de milliers victimes s’entassent depuis de nombreuses années, et tout le monde s’en moque. Lorsque les pauvres meurent, nous continuons d’acheter des écrans plats et remplir nos terrasses. Mais lorsque nous sommes attaqués, le monde doit s’arrêter, pleurer avec nous, et partir en guerre. Sommes-nous vraiment en guerre ? Sommes-nous concrètement dans un état de siège armé qui nous empêche de vivre et qui nous condamne à mourir ou à prendre les armes ? Je ne le crois pas. Certes nous avons été, et nous serons de nouveau victimes d’attentats qui feront toujours plus de morts. Mais je ne crois pas qu’il soit possible, en tout cas pour les mois qui viennent, de vivre sous une occupation d’extrémistes armés comme cela a été le cas lors de la dernière guerre mondiale. A moins évidemment que cela vienne de l’intérieur de notre pays ; que notre pouvoir soit confié à nos partis les plus radicaux. Je veux encore croire que nous ne commettrons pas cette dramatique erreur. Mais l’être humain ayant l’incroyable faculté d’oublier systématiquement le passé, et de céder plus facilement à la passion, la haine, plutôt qu’à la raison, cette douloureuse éventualité se rapproche un peu plus chaque jour. Et les conséquences d’un tel basculement politique se révèleront bien plus dramatiques que les tristes attentats dont nous sommes victimes aujourd’hui.

    Il est vrai que pour l’heure, les seules personnalités politiques à proposer, pour notre société, une véritable vision d’avenir (même si je ne la partage absolument pas) sont celles des parties d’extrême droite, dont le Front National. Entre une droite traditionnelle (les Républicains) qui ne propose que de continuer toujours plus loin dans la construction d’un capitalisme effréné, générateur de pollution, d’inégalités sociales, de pauvreté ; un centre inexistant (le Modem) ; une gauche avoue aujourd’hui être libérale (le PS), plus proche du centre que des valeurs sociales qui devraient être son ciment, qui n’envisage que le statu quo ou l’alliance avec la droite pour contrer le Front National, aveux d’échec avant d’avoir commencé la bataille ; une extrême gauche (Front de gauche, Partie de gauche, etc.) dont la seule proposition est de se battre contre le Front National ; des écologistes divisés ; des tricheries, des guerres de pouvoir, des mensonges, du vol ; il n’est plus possible, pour notre population appauvrie, de se projeter dans un vrai projet de société, sauf pour celles et ceux qui décident d'emprunter les voies de la radicalisation, malheureusement.

    Sans projet de société, le radicalisme a toutes ses chances

    Les seules propositions concrètes qu’ont faites François Holland et son gouvernement pour combattre Daech et toutes les vagues racistes de réflexions nauséabondes sont d’intensifier les bombardements en Syrie et de limiter nos libertés. Daech vient donc de gagner cette partie. Le Front National également. Aucune remise en question sur les causes qui mène à la radicalisation, aucun travail pour rassurer le peuple français, rien. Le seul objectif de nos élus dépassés, c’est combattre le Front National pour s’assurer des sièges à l’Assemblée Nationale, dans les régions, et donc garder le pouvoir en misant sur le « vote utile », arme culpabilisante absolue de canalisation antidémocratique. Que d’ambition.

    C’est dans cette époque aussi troublée que la notre, où nous avons besoin d’affirmer notre identité, de nous rapprocher des valeurs qui nous ont construits et qui détermineront notre avenir, qu’il est impératif de construire une nouvelle société. Il est affligeant, et terrifiant, de constater que seul le Front National propose un nouveau projet. Les partis démocratiques ont décidé qu’il était plus sage d’opter pour un statu quo, voir d’alimenter un peu plus le système actuel qui ne bénéficie qu’aux élites et favorise le radicalisme. Si nos élus ne sortent pas de leur torpeur, il est clair que nous nous dirigeons tout droit vers un schisme d’état dont les conséquences sociétales et environnementales n’auront aucune équivalence avec ce que nous avons connu par le passé. Mais nos élus hors du monde le comprendront-ils à temps ? Si l’on regarde vers le passé, a priori, non.

    Ceci est mon troisième billet.

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  • 05/12/2013 - bastamag.net

    L’équivalent de 60% de leurs bénéfices : c’est ce qu’ont versé à leurs actionnaires les 47 grandes entreprises françaises cotées en bourse que nous avons étudiées. Alors même que les suppressions de postes se multiplient et que l’investissement est en berne, plusieurs grands groupes hexagonaux continuent de redistribuer une proportion considérable de leurs profits aux actionnaires – y compris lorsque ces profits sont faibles voire inexistants. Notre enquête sur ce « coût du capital » révèle également que l’Etat est un actionnaire aussi gourmand que les autres.

    Les actionnaires nuisent-ils à la « compétitivité » de leur entreprise ? Combien coûte la rémunération du capital pour les entreprises cotées ? Chaque année, les dividendes versés aux actionnaires s’élèvent de quelques dizaines de centimes à plusieurs euros par action. Insignifiant ? Loin de là. Car les grandes entreprises françaises sont plutôt très généreuses avec leurs actionnaires. En moyenne, les 47 entreprises que Basta ! et l’Observatoire des multinationales ont étudiées (elles figurent parmi les plus grosses sociétés cotées en France, voir notre tableau ci-dessous) ont versé en 2012 l’équivalent de 60% de leurs bénéfices aux détenteurs de leur capital. Soit 32 milliards d’euros environ sur les 54 milliards de « résultats nets » des entreprises, après acquittement de l’impôt. Le montant total de ces dividendes varie de 15 millions d’euros (Atos) à près de 5,3 milliards (Total). Huit grandes entreprises françaises ont choisi de verser à leurs actionnaires des dividendes supérieurs à leurs bénéfices.

    Quand les actionnaires accaparent 60% des bénéfices des entreprises
    (c) NYSE Euronext

    Pour les conseils d’administration, maintenir un dividende élévé permet, en théorie, de fidéliser les actionnaires. Plusieurs administrateurs y consentent d’autant plus facilement qu’ils détiennent eux-mêmes une forte participation au capital de l’entreprise. Parmi notre panel, seule une poignée de groupes sont plutôt raisonnables, redistribuant moins de 20% de leurs bénéfices. Rémunérer fortement le capital, c’est se priver de financements qui auraient pu bénéficier à la recherche, à de nouvelles stratégies industrielles, à la réduction des impacts environnementaux ou à l’amélioration des conditions de travail.

    Priorité aux financiers, quoiqu’il en coûte

    Plusieurs groupes sont d’une générosité à toute épreuve à l’égard de leurs investisseurs. Même en perdant de l’argent, ils leur distribuent des dividendes ! Chez ArcelorMittal, ST Micro, Accor et Areva, à tous les coups, les actionnaires gagnent. Malgré une perte de 2,8 milliards, le n°1 de l’acier a ainsi ponctionné 910 millions d’euros au profit de ses actionnaires ! La fortune de la famille Mittal, qui détient près de 40% du groupe sidérurgique – et donc perçoit environ 40% des dividendes, soit 360 millions d’euros – passe avant tout. Les métallos sont les grands perdants. En 2013, le groupe supprime 1 600 emplois en Belgique après avoir fermé, l’année précédente, l’aciérie de Florange en Moselle.

    Même ambiance chez l’hôtelier Accor. Malgré une perte de 600 millions d’euros l’année dernière, le groupe (Sofitel, Novotel, Ibis, Mercure…) a versé 269 millions d’euros de dividendes… Ce qui ne l’a pas empêché de lancer un « plan d’économie en Europe de 100 millions d’euros » et de supprimer 172 postes en France en 2013. Bref, priorité aux financiers. En l’occurrence, le fonds d’investissement Colony Capital, allié au fonds Eurazeo, premiers actionnaires d’Accor avec 21% du capital. Le nouveau PDG du groupe, Sébastien Bazin, en est d’ailleurs issu. « D’autres emplois sont menacés. Chaque fois ce sont des compétences fortes qui disparaissent en même temps que des collègues qui perdent leurs emplois. Dans le même temps l’entreprise continue de distribuer de forts dividendes », dénonce de son côté la CGT au sein de ST Micro. Et pour cause, la direction a maintenu le versement de 273 millions d’euros de dividendes malgré un résultat négatif de 903 millions en 2012. La réduction des dettes, c’est pour les autres.

    Entreprise Résultat net (en millions d'euros) Dividendes distribués (en millions d'euros) Montant des dividendes comparé au résultat net (en %) Montant des dividendes par salarié (en euros)
    ACCOR -599 269   2009
    AIR LIQUIDE 1609 803 50 16222
    ALSTOM 802 243 30 2616
    ARCELORMITTAL -2826 910   3716
    AREVA -99 112   2408
    ATOS 228 14.9 7 194
    AXA 4152 1720 41 18227
    BNP PARIBAS 6553 406 6 2153
    BOLLORE 804.3 132.6 16 2387
    BOUYGUES 633 504 80 3767
    CAPGEMINI 370 154 42 1264
    CARREFOUR 1233 257 21 704
    CASINO 564 332 59 1042
    DANONE 1787 835 47 8154
    EADS 1228 379 31 2699
    EDF 3316 2125 64 13303
    ERAMET 8 59 738 4111
    ESSILOR 584 176.6 30 3485
    GDF SUEZ 1550 1887 122 8603
    GEMALTO 201 26 13 2600
    ILIAD 186.5 21.2 11 3259
    KERING (PPR) 1048 473.3 45 14154
    L'OREAL 2868 1268.2 44 17459
    LAFARGE 432 145 34 2254
    LEGRAND 507 245 48 6950
    LVMH 3424 1448 42 13616
    MICHELIN 1571 378 24 3523
    ORANGE 1104 3632 329 21298
    PERNOD RICARD 1201 411 34 22449
    PEUGEOT -5010 0 0 0
    PUBLICIS 737 189 26 3287
    RENAULT 1772 338 19 2660
    SAFRAN 1025 300 29 4796
    SAINT-GOBAIN 766 700 91 3631
    SANOFI 4967 3487 70 31141
    SCHNEIDER ELECTRIC 1927 919 48 6031
    SOCIETE GENERALE 774 508 66 3299
    SODEXO 525 221 42 524
    SOLVAY 710 278 39 9552
    ST MICRO -903 273   5634
    SUEZ ENVIRONNEMENT 251.4 601 239 7555
    TECHNIP 543.1 172.6 32 4728
    TOTAL 10694 5288 49 54445
    VALLOUREC 216.8 150.5 69 6494
    VEOLIA ENVIRONNEMENT 393.8 353.8 90 1111
    VINCI 1916.7 951.9 50 4940
    VIVENDI 2550 1245 49 21447

     

    Sur les cinq entreprises déficitaires de notre panel, seul Peugeot a renoncé à rémunérer ses actionnaires. Mais c’est surtout pour sauver l’activité financière du groupe, la Banque PSA Finance, que la famille Peugeot, actionnaire à 25%, ne s’est pas versée un seul euro de dividendes. En échange d’une garantie de l’État sur 7 milliards d’euros d’emprunts, le groupe a promis en octobre 2012 de « ne pas procéder à des distributions de dividendes ou à des rachats d’actions, et à ne pas attribuer aux membres du directoire d’options de souscription ou d’achat d’actions ni d’actions gratuites ». Et ce, pendant trois ans. De leur côté, les salariés de PSA paient le prix fort : plus de 8 000 emplois sont supprimés, l’usine d’Aulnay-sous-Bois en région parisienne a fermé, celle de Rennes est menacée. Au printemps 2012, les effectifs de l’activité automobile s’élevaient à 67 100 personnes. Selon les syndicats, ils devraient fondre à 55 900 employés d’ici à mi-2014. Les actionnaires, eux, devraient de nouveau percevoir des dividendes en 2015. Les salariés au chômage arriveront, eux, en fin de droits.

    L’État, un actionnaire aussi gourmand que les autres

    L’État, directement ou via l’une de ses institutions – Caisse des dépôts, Fonds stratégique d’investissement (FSI), Commissariat à l’énergie atomique (CEA)… – est présent au capital d’une vingtaine d’entreprises de notre panel. Dans neuf d’entre elles, la puissance publique pèse plus de 10% des actions, donc des voix (Areva, EADS, EDF, Eramet, GDF Suez, Orange, Renault, Safran, ST Micro). Comment se comporte l’État actionnaire ? Est-il aussi gourmand que les gros fonds ou portefeuilles d’actions privés ? Le cas Areva montre que l’État peut privilégier ses propres intérêts financiers, quel que soit l’état de santé de l’entreprise. Actionnaire à plus de 85% du champion du nucléaire, via notamment le CEA, l’État a empoché la plus grande part des 112 millions d’euros de dividendes, quand le fabricant de combustible nucléaire déplore une perte de 99 millions.

    Areva n’est pas le seul exemple. En plus des multinationales déficitaires, quatre autres grands groupes français ont distribué à leurs actionnaires davantage d’argent qu’ils n’en ont gagné. Ils ont un point commun : l’État est très présent au sein du capital. Eramet, l’une des rares sociétés minières hexagonales, a ainsi versé l’équivalent de 738% de ses bénéfices en dividendes ! Parmi ses actionnaires figurent le FSI et le Bureau de recherche géologique et minière, un établissement public (27% à eux deux). Les actionnaires d’Orange – dont l’Etat et le FSI (toujours 27%) – peuvent également se réjouir : ils ont perçu 328% des bénéfices du principal opérateur de téléphonie. Un pactole non négligeable : 3,6 milliards d’euros. La rémunération, longtemps fixée à 1,4 euro par action, a entravé les investissements et a provoqué de sérieux remous en interne. « Depuis dix ans, Orange a versé 27 milliards d’euros de dividendes, c’est plus que son poids en Bourse aujourd’hui ! », dénonçait la Confédération générale des cadres lors de la dernière assemblée générale des actionnaires fin mai 2013. Une proposition de baisse des dividendes à 0,78 euro par action a plusieurs fois été refusée par les actionnaires... avec le soutien de l’Agence de participation de l’État, qui représente le ministère des Finances. Elle est désormais en vigueur.

    Même scénario pour GDF Suez. Prétextant une hausse des coûts d’approvisionnement, GDF Suez ne cesse de réclamer – et d’obtenir – de nouvelles hausses des tarifs du gaz. Tout en redistribuant des dividendes représentant 122% de ses bénéfices à ses actionnaires, au premier rang desquels l’État (39% avec la Caisse des dépôts). Quand à Suez environnement, elle a distribué 239% de son résultat après impôt, dont un bon tiers à son principal actionnaire… GDF Suez. Enfin, EDF, la seconde entreprise cotée en bourse, avec Areva, où l’État est majoritaire (84%), a reversé l’équivalent des deux tiers de ses bénéfices à ses propriétaires, soit 2,1 milliards d’euros. Toujours ça que les énergies renouvelables n’auront pas ! Reste à voir comment seront répartis les résultats de l’exercice 2012 pour vérifier si le gouvernement socialiste infléchit ces pratiques. Ou s’il préfère de l’argent frais à court terme quitte à fragiliser des entreprises.

    Sept mois de salaires pour les actionnaires

    S’il existait en France la palme du salarié le plus rentable au regard de l’argent qu’il fait gagner aux actionnaires de son entreprise, elle serait remise aux salariés de Total. Chacun des 97 126 employés du groupe pétrolier a rapporté plus de 54 000 euros de dividendes aux propriétaires de l’entreprise en 2012 ! Soit les trois quarts de ce que le groupe pétrolier dépense en moyenne par salarié chaque année. Et l’équivalent de trois années de Smic ! Total est aussi celle qui, parmi les 47 entreprises que nous avons étudiées, a reversé à ses actionnaires les plus gros dividendes : 5,3 milliards d’euros, soit quasiment la moitié de ses bénéfices.

    A ce concours des salariés les plus « stakhanovistes » du point de vue de la rentabilité boursière, le personnel de Sanofi arrive en deuxième position : chacun des 112 000 employés du labo pharmaceutique, dont 28 000 en France, a permis à ses actionnaires d’engranger plus de 31 000 euros. Mais le capitalisme financier ne connaît pas la gratitude : entre 900 et 1 500 postes devraient être supprimés en France d’ici 2015, en particulier dans la recherche. Parallèlement, 70% des bénéfices, soit près de 3,5 milliards, ont été distribués aux actionnaires du groupe.

    Les salariés de Pernod Ricard, de Vivendi et d’Orange ont également fait gagner plus de 20 000 euros à leurs actionnaires. Pour la moitié des opérateurs et techniciens de l’ancienne France Télécom, qui gagnent moins de 2 950 euros bruts, cela représente sept mois de salaire ! Ils récupéreront cependant l’équivalent d’un mois de salaire au titre de l’intéressement, et se consoleront peut-être en se rappelant que les salariés, via un fonds commun de placement, possède environ 4% des actions d’Orange.

    Ces actionnaires qui en profitent le plus

    La bourse est un vaste monde. Les petits actionnaires et leurs PEA (Plan d’épargne en actions) y côtoient les grandes fortunes, françaises mais aussi belges, états-uniennes, égyptiennes ou russes. On y croise une multitude de gestionnaires de portefeuilles d’actions des grandes banques françaises ou nord-américaines, des fonds de pension, des fonds souverains norvégiens, koweïtiens ou qataris, des États – la France bien sûr mais aussi l’Italie (dans le capital de ST Micro), l’Allemagne (EADS) ou le Grand Duché du Luxembourg (ArcelorMittal). Les salariés de plusieurs groupes y détiennent, via les fonds communs de placement de leur entreprise, des participations parfois non négligeables : chez Bouygues (23%), Safran (15%), Vinci (10%), Essilor (8%), ou Vallourec (7%) [1] Y apparaissent aussi quelques « humanitaires », comme le fonds britannique « Children’s Investment Fund Management » (Fonds d’investissement pour les enfants) qui possède une petite participation dans le groupe Safran, spécialiste en matière de défense et de drones. Et des multinationales elles-mêmes actionnaires d’autres multinationales. Tous sont unis vers un même objectif : percevoir des dividendes.

    Si l’État est loin d’être le dernier à profiter du « coût du capital », plusieurs grosses entités bénéficient pleinement de ce généreux régime de redistribution. Le Groupe Bruxelles Lambert est ainsi présent en force : au sein de Lafarge (20,9%), de Pernod-Ricard (7,5%), de Suez environnement (7,2%), de GDF Suez (5,1%) et de Total (4%). Il s’agit d’une holding détenue par le milliardaire belge Albert Frère et la famille du milliardaire canadien Paul Desmarais, décédé en octobre. Tous deux étaient proches de l’ancien président Nicolas Sarkozy.

    Du CAC 40 aux sociétés coopératives

    Le groupe Arnault, qui gère les intérêts de la première fortune de France, possède 46,2% de LVMH, qui a reversé 1,4 milliard d’euros de dividendes à ses actionnaires, et 15,6% de Carrefour (en alliance avec Colony Capital, très présent dans Accor). La société Wendel, dans laquelle officie l’ancien président du Medef Ernest-Antoine Seillières, possède 19,4% du groupe industriel Legrand et 17,4% de Saint-Gobain. Cette dernière est l’une des sociétés du CAC 40 les plus généreuses avec ses actionnaires. Ils se sont vu accordés des dividendes équivalent à 91% des bénéfices, soit 700 millions d’euros. Famille Bouygues ou Bettencourt, Financière Pinault... La liste des autres gros propriétaires de capitaux est loin d’être exhaustive.

    Dans un monde parallèle au capitalisme financier, une autre répartition des richesses est à l’œuvre. Tout n'est pas parfait au sein des 2 000 sociétés coopératives et participatives (Scop) qui existent en France. Mais un autre partage de la valeur créée y est pratiquée entre détenteurs du capital et les 43 800 salariés qui y travaillent. « En 2011, 43,2 % des excédents nets ont été distribués aux salariés sous forme de participation, 44,1 % ont été mises en réserve et 12,7 % ont rémunéré le capital investi dans les entreprises », explique la Confédération générale des Scop. L’État actionnaire pourrait, au moins, s’en inspirer.

    Auteur : Ivan du Roy
    Source : http://www.bastamag.net/Quand-les-actionnaires-accaparent
    N'hésitez à visiter la page originale de cet article pour des plus amples informations.

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  • J’ai été, il y a quelques jours, particulièrement surpris par l’un des postes d’une amie sur Facebook, ou plus précisément par ce qu’elle a partagé ; l’une des pages du réseau sociale qui s’intitule : « non aux Roms dans ma ville ». Je connais cette amie depuis peut-être 10 ans. Nous avons mangé et bu ensemble, beaucoup rit également. Mais je me rends compte que nous n’avons jamais abordé le sujet de l’immigration et des étrangers sur notre sol. Pas que ce sujet soit tabou, mais je n’envisage jamais que l’un de mes amis, qu’une personne pour qui j’ai de l’estime, voir de l’affection, puisse avoir des idées qui pourraient s’apparenter à celles de l’extrême droite. J’ai eu la même expérience il y a quelques semaines avec un couple que je croise plusieurs fois par an chez des amis. Au milieu de nos bavardages quant au dernier film que nous avons vu, nos prochaines vacances ou nos jeux préférés, lui me déclare « que notre culture n’est pas compatible avec celle du sud ; et qu’il va bien falloir trouver des solutions pour que tout le monde puisse retourner tranquillement chez soi ». Sur le coup, je suis resté scié. Outre le sentiment de gêne lorsqu’il eut exprimé à demi-mot sa pensée, comment ce type pour qui, quelques minutes plus tôt, j’avais de la sympathie, des goûts en communs, puisse finalement nourrir des idées aussi violentes ? Je n’exclus évidemment pas du tout le fait que je puisse partager des centres d’intérêts avec des personnes dont les sensibilités politiques sont à l’opposée des miennes. Mais peut-on encore parler de sensibilité politique lorsqu’on évoque l’idéologie de l’extrême droite ? A chaque fois que je rencontre quelqu’un en accord avec ces idées, je reste sonné, comme si j’avais reçu un coup de poing en plein ventre. J’ai face à moi un être humain qui, d’un premier abord très sympathique, vient de céder aux idéologies insidieuses qui ont tué plusieurs millions de personnes il y a moins d’un siècle.

    Discrimination naturelle


    Pour revenir à mon amie et son partage sur Facebook, je ne peux raisonnablement pas comparer son exaspération face aux Roms qui pourraient s’installer devant chez elle et le génocide juif nazi. Mais lorsque l’on commence à étudier la page Internet partagée, on peut retrouver tout de même quelques phrases qui font froid dans le dos, comme celle qui propose d’expulser tous les Roms hors d’Europe. Je sais que ce sont généralement les plus extrêmes qui s’expriment, l’anonymat du net permettant, sans retenue, de déverser sa haine et son idiotie. Mais tout de même, comment cette amie, que j’affectionne, et que je reconnais comme intelligente, qui a reçu une éducation similaire à la mienne, puisse céder à de pareilles divagations extrémistes ? La peur ? La fatigue ? La méconnaissance ? Quand bien même, cela ne peut excuser le fait de militer pour empêcher qu’une population puisse s’installer sur un territoire, qu’on lui interdise le droit absolu que tout humain devrait posséder, celui de vivre avec sa famille sur une terre.

    Discrimination naturelle

    Je reconnais à quel point il peut être compliqué d’ouvrir ses volets le matin et de tomber sur un camp de caravanes sans sanitaires, sans collectes des déchets, entendre une autre langue, assister à des mœurs que l’on ne comprend pas. L’étranger a toujours fait peur. Surtout celui qui est pauvre (et donc « sale ») et qui est prêt à tout pour manger. Il porte en lui nos afflictions ; il est synonyme de chômage, de crise, de dégradation, de vol et de crime. Je ne crois pas que le Rom mérite d’être assimilé, de par son unique identité et son mode de vie à tous nos maux. Attention, à la base, les Roms ne sont pas des nomades. Ils sont sédentaires comme la majorité des Européens. C’est parce que nous les excluons, que nous leur refusons du travail qu’ils sont obligés de se déplacer et de chercher toutes les solutions possibles pour faire vivre leurs familles. Un teint de peau un peu plus mat, un pantalon déchiré, une autre langue suffisent à alimenter peur et haine. Comment une communauté de 6 000 000 d’individus répartis dans toute l’Europe peut-elle être responsable de nos problèmes ? Nous ne subissons pas un envahissement de la France par les Roms. Mais les utiliser pour attiser la haine reste bien pratique lorsqu’on a besoin de gonfler les rangs d’électeurs fatigués et apeurés, prêts à céder à tous les discours anti-système pour nourrir de vains espoirs d’une vie meilleure.

    Alors « Non aux Roms dans ma ville… dans ces conditions ».

    Ceci est mon second billet.

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  • Qui suis-je aujourd’hui ?

    Je suis né en 1979. J’aime dire que je suis né à la fin des années 70. Pour moi, ces années ont plus de style que les années 80 et 90. Je ne sais pas écrire. Je n’ai pas de beaux mots. Mon champ lexical est réduit. Je n’ai pas de style. Je n’ai pas fait l’ENA. Je n’ai pas fait d’école de toute façon. Mes études se sont arrêtées juste après un baccalauréat qui ne m’a jamais servi. Je n’avais pas choisi de faire celui-ci. Mais famille ne possède quasiment rien, ni aucune relation qui aurait pu me permettre de m’élever socialement. Ainsi, je ne connais personne. Mes revenus sont plutôt dans la fourchette basse de notre pays, et imaginer atteindre la médiane des revenus français me semble, pour l’heure, quelque chose de compliqué. Peut-être dans quelques années. Je suis un anonyme, un inconnu du peuple qui, en ces temps troublés, tente de ne pas céder à la passion, à la peur ou à l’acceptation.

    Pourquoi ce blog

    Je vote. Tout du moins, j’ai voté. J’ai voté parce que j’ai une conscience civique qui me pousse à prendre mes responsabilités citoyennes. Mais la dernière fois où il m’a fallu m’exprimer avec mon bulletin, je ne l’ai pas fait. J’ai culpabilisé, c’est vrai. Mais dans le même temps, je ne voyais pas pour qui voter, même si mon cœur a toujours balancé à gauche. Je ne me voyais pas, par mon vote, cautionner une société dans laquelle je ne me retrouvais plus. Je ressens de la colère parce qu’on me ment, par qu’on pille mon pays et ma planète. Et je sais que cela continuera jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien. C’est logique, il en a toujours été ainsi. Je n’adhère à aucun parti politique et je manifeste très rarement. Je travaille beaucoup, mais je ne suis pas productif. Je n’arrive pas à me concentrer. Je regarde le monde par le spectre qu’on veut bien me laisser scruter. Je réfléchi. Je lis. Et je me rends compte, bloqué par ma condition sociale, que je n’ai aucun moyen d’agir, aucune possibilité de faire avancer les choses, si ce n’est par l’écrit. Ainsi, j’ai décidé de m’y mettre ; d’écrire ma vision des choses, d’exprimer avec mes mots, ce que pourrait être une nouvelle société.

    Voici mon premier billet.

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